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SECTION Religion, Philosophie, Science
J’ai évoqué dans « pourquoi on meurt » la logique darwinienne.
Ce qui est intéressant avec Darwin, c’est qu’il a amené une révolution dans la manière de voir le monde dans la philosophie occidentale. Avant lui le monde était finaliste, création Divine, issue de la volonté du Divin. Après lui, le vivant évoluait seul par l’erreur, le hasard et la sélection de l’erreur utile. Un autre univers de pensée !
Bien entendu, cette conception n’est pas uniquement Darwinienne, elle reflète une pensée qui s’est ouverte après le 15ème siècle après la découverte de terres nouvelles, de techniques nouvelles et l’émancipation de la science par rapport aux dogmes religieux.
Ce qui pose encore problème aujourd’hui pour que cette logique soit universellement acceptée, c’est qu’elle n’est pas facile à corroborer avec l’ensemble des actions finalistes du vivant qui nous entoure, et pourtant le hasard, le non déterminisme du chaos, peut créer du sens et le sens, du finalisme !
Je vais essayer ici de vous l’expliquer de la manière la plus simple que je puisse. J’essayerai aussi de ne pas trahir ni vous lecteurs, ni la science en notant d’abord le chaînon manquant de la théorie global du vivant.
En revanche, je vais m’affranchir d’une obligation scientifique en ne citant aucune des références des expériences que je cite, il vous suffit d’utiliser la super mémoire assistée collective qu’est internet pour, par exemple, taper « Soupe pré-biotique » et tout connaitre des paramètres exacts de l’expérience et de ses auteurs.
Le chaînon manquant de la théorie globale de l’évolution est justement l’apparition de la première cellule à s’être divisée. LUCA Last Universal Common Ancestor ou en français, Dernier ancêtre commun universel. En fait de dernier, ce serait plutôt le premier dans le sens de l’évolution, mais je pense que les scientifiques ne résistent pas à la poésie des mots et trouvent Luca plus joli que Fuca ;-)
Pour être très clair, sur ce chainon manquant :
Les scientifiques ont cru résoudre le problème de l’apparition de la vie terrestre au début du 20éme avec l’expérience de la soupe prébiotique où des éclairs ont fait apparaitre les premiers acides aminés à partir d’un mélange de gaz, d’eau et d’éléments primaires.
Après avoir crié victoire, ils se sont aperçus que la distance qui sépare les briques que sont ces acides aminés, ces molécules complexes qui construisent la matière vivante, de la première cellule (qui serait alors, en conservant la même image, un immeuble, avec réseau câblé, murs fenêtres, isolation… et plan d’assemblage) est à peu près aussi grande que la distance qui sépare cette cellule LUCA de Einstein !
Ce n’est donc pas un chaînon qui est manquant, mais bien une chaine complète qui permettrait de résoudre cette question du « Comment ? »
J’ai pour ma part deux intuitions que je vous donne comme telles,
Je suis intimement persuadé que les variations du vivant sont plus rapides qu’on l’imagine en général. L’humain était l’équivalent d’un rongeur, il y a 60 Millions d’années, après des séparations en une multitude de mammifères différents, Il est passé de l’état de primate évolué au pilote de chasse supersonique en moins de 1 million d’année, ce qui n’est rien en temps, rapporté à 4,5 milliards d’années.
On sait par la géologie, la tectonique des plaques et l’astronomie que notre terre a connu plusieurs cataclysmes majeurs qui ont été des fins du monde quasiment complètes tous les 250 millions d’années environs
La première de mes intuitions est donc que la terre, planète tectonique, est un palimpseste où le vivant qui vit dans les zones les plus stables, les plus protégées de la planète, à savoir, les profondeurs des fosses marines recouvertes de kilomètres d’eau protectrice et isolante, remonte par convection lorsque le volcanisme s’emballe et réensemence les mers et ensuite les terres dès que les conditions le permettent
Cette intuition est confortée par la découverte d’êtres vivants pluricellulaires, en 2011, au Congo. D’après les datations toujours en cour de vérification, ces fossiles seraient du premier milliard d’années de vie de notre planète et contredisent l’idée d’un vivant resté unicellulaire pendant 3 milliards d’années et ayant d’un seul coup trouver le chemin des spéciations pluricellulaire, il y a 800 millions d’années, qui est l’hypothèse la plus souvent retenue, sur un sujet très peu connu et difficile à explorer.
Et elle explique aussi que le vivant réapparaisse après des cataclysmes majeurs où des géo croiseurs massifs tombent sur notre planète, créent des raz de marée plus haut que les montagnes, qui, faisant plusieurs fois le tour de la terre, rincent les continents, font déclencher des écoulements de laves clastiques, enclenchent un volcanisme massif à cause de l’onde de choc et provoquent un hiver de plusieurs millions d’années en obscurcissant la stratosphère par des millions de mètres cubes de poussière en suspension.
Ces cataclysmes majeurs modifient tellement massivement les caractéristiques chimiques de l’atmosphère et des eaux de surfaces, qu’ils doivent en toute logique s’accompagner d’un renouvellement de presque tout le vivant existant précédemment.
L’autre intuition est une hypothèse que ne m’appartient pas et n’est pas vérifiée encore :
Il y aurait au sein du volcanisme des fosses marines, dans certaines conditions de pression et de température, des réactions chimiques et physiques où l’eau perfuserait dans des roches riches en carbone et métaux qui avec l’oxygène et l’hydrogène de l’eau contiendraient et créeraient des acides aminés
Ces perfusions lentes dans des fissures, comme dans un cocon, pourrait conduire à un phénomène d’assemblage darwinien des composants par l’erreur utile, et produire de temps à autre une ou plusieurs proto-cellules susceptibles de se reproduire.
Ces deux hypothèses sont assez belles, esthétiquement parlant, et elles ouvrent des pans de philosophie sur l’origine tellurique de la vie. Elles n’influent pas sur la suite de mon raisonnement qui commence avec LUCA et utilise la logique Darwinienne, que je vais commencer par redéfinir.
La logique darwinienne appliquée à partir de LUCA, impose qu’il ait eu le pouvoir de se diviser en deux par une mémoire de construction séparée et interne appelée ADN. Ces deux LUCAS consommaient une molécule qu’ils transformaient en une autre pour avoir la possibilité de se régénérer.
Cette molécule était abondante, pour la simple raison que si elle ne l’était pas, ils seraient morts de faim et le processus se bloquait.
La logique darwinienne est au départ une logique causale. C’est parce que les éléments du milieu sont ainsi que le vivant perdure et se reproduit.
Ce LUCA devient des millions par ce principe, il devient tellement nombreux, qu’il épuise sa nourriture, un partie de la population meurt de famine et les erreurs de recombinaison commencent à produire des spéciations de lignées. La mort programmée devient déjà utile parce qu’elle adapte le volume de la population à la ressource disponible. (voir pourquoi on meurt)
Sans qu’il y ait d’ordre logique, une des premières spéciations utiles est sans doute une espèce qui utilise une alimentation et rejette une molécule inverse de la parenté, la symbiose des deux est une force pour perdurer.
Une autre, répandue dans tout le vivant, je vous l’ai dit, est la mort programmée.
Associée à la symbiose, elle évite les espèces explosives qui exploitent toute une même sorte de nourriture et transforment radicalement le milieu à une vitesse qui ne permet pas à l’adaptation de se faire. La mort programmée n’empêche pas complètement ce phénomène, mais elle en limite la portée, et par ailleurs, dans cette logique darwinienne toute espèce qui ne mourrait pas et se reproduirait vite sur une planète aux ressources finies irait à l’épuisement des ressources et disparaitrait d’un coup.
Et il existe encore une autre raison rendant la mort utile, indispensable même : sur une planète au climat changeant, la perduration de la transmission de gènes tels que la peau glabre, ou le poil court, par exemple, alors que la terre se gèle est un handicap, la mort de ce programme génétique, règle le problème et facilite et accelère l’adaptation de l’espèce.
La mort est indispensable au fonctionnement logique du vivant, elle en est la vitalité.
Et l’une des premières fonctions à être sans doute apparue dans les spéciations, c’est la possibilité de se déplacer.
Et là je dois m’arrêter sur l’importance de ce point.
Le déplacement autonome même infime des individus est un atout considérable parce qu’il permet d’aller là où la ressource est disponible et d’échapper à la toxicité de ses propres rejets, mais philosophiquement, c’est encore plus important :
pour guider ses déplacements, très vite l’individus doit mémoriser ce qui est bon de ce qui est mauvais, la nourriture est bien, les rejets sont mal, la vie est bien, la blessure et la mort sont mal.
A cet instant précis de l’évolution nait le sens. Le vivant donne un sens à la vie, de causale, il devient finaliste. Il se déplace avec un but et différencie le bon du mauvais. C’est la naissance de la proto-intelligence, une mémoire comportementale et un jugement pour décider.
Continuons.
La logique des duplications ADN continue à procéder à des spéciations hasardeuses, des fonctions apparaissent, elles s’associent ; la mémoire architecturale se complexifie et se complète d’une mémoire comportementale et contextuelle et de fonctions de plus en plus avancées de prises d’information sur le milieu.
Déjà, les systèmes vivants modifient l’inerte et interagissent entre eux, la logique finaliste et la logique causale se confronte et plus un être vivant associe de mémoires et de fonctions de prises d’information, plus il devient finaliste, intelligent, utisant ses mémoires, plus il peut aller vers des niches libres. (Je n'aime pas le mot supérieur en matière d'évolution, la bactérie qui restera vivante après que l'homme aura stérilisé son environnement aura peut-être ce sentiment vis à vis de nous...)
Le vivant évolué se nourrit de vivant qui transforme pour lui des matières inertes qu’il ne sait plus, lui, synthétiser, parce que diverse en lui-même, il a besoin d'une alimentation variée pour les différentes cellules associées qui le compose.
Une chaine alimentaire se créée et fournit des niches nouvelles à des espèces nouvelles qui profitent des anciennes comme une ressource renouvelable.
L’évolution s’emballe, le vivant se sexualise ce qui permet une plus grande efficacité de brassage des gènes et d’expression de variations fiables, l’ADN devient progressivement une bibliothèque, en étant Darwinienne l’évolution n’est plus Darwinienne, elle ne se fait plus uniquement par le hasard, elle exprime ou endort des fonctions en fonction des variations de notre planète tellurique, ou plus simplement, des changements locaux.
Des langages hormonaux se superposent à la mémoire ADN et mémorise des stratégies comportementales d’accouplement ou de lutte. la sexualité et la victoire entrent dans les sensation de plaisir. Un système nerveux centralisé se develope, le finalisme se fait pensée. Les façons dont l’ADN est transporté pour la reproduction sexuée deviennent un catalogue extraordinaire de stratégies causales ou finalistes selon les espèces. Certaines essaiment, certaines s’aiment, d’autres sèment, les dernières se divisent et se multiplient à la puissance deux
Tant que le milieu reste inchangé et que la stratégie fonctionne pourquoi changer ?
Les associations inter et intra-espèces créent de nouvelles niches, des unicellulaires vivent depuis le début dans les pluricellulaires evoluées, des pluricellulaires dépendent les uns des autres et forment des systèmes. Ils créent des langages olfactifs, hormonaux, comportementaux. Les plantes élaborent des stratégies avec les insectes pour les attirer et s’en défendre. Les mémoires se transmettent de vivant à vivant, elles se complexifient, et permettent au vivant de devenir de plus en plus finaliste dans un environnement de plus en plus complexe, l’intelligence se renforce chez les animaux, l’analyse du milieu et le finalisme éclairée est un atout considérable pour survivre.
Et le vivant devient feux d’artifice, partout il se créée des niches qui créent des places pour de nouvelles espèces, il est sorti de l’eau, il a envahi les terres, modifié l’inerte et le minéral et l’utilise comme substrat, modifie le climat, la composition de l’atmosphère, créée des roches. Il nage, marche, vole, vit sous et sur terre, sur et sous l'eau !
Il migre pendant les glaciations ou il meurt puis revient !
D’autres langages apparaissent, un vocabulaire qui permet l’interaction du vivant et les actions complexes concertés. Il devient mémoire transmissible et brique d’intelligence, de représentation abstraite. La conjugaison permet de déplacer la pensée dans le temps, la grammaire structure, hiérarchise le sens, le cerveau se complexifie, les mathématiques se laissent découvrir comprendre. Elles sont l’architecture du chaos, elles permettent de le modéliser, de le reproduire. Tout le vivant est intimement interconnecté en système qui interagisse, les mémoires qui accumulent les savoirs et l’intelligence de les comprendre sont une complexification d’une même logique évolutive
Et dans cette logique Darwinienne initialement non finaliste, l’intelligence devient le moyen que l’univers chaotique et non finaliste a trouvé sur une planète tellurique pour pouvoir se contempler et se comprendre lui-même.
Sur une et sans doute pas uniquement !
Mais permettez-moi d’aller plus loin.
La logique Darwinienne de l’évolution, ne s’arrête pas au simple vivant.
En zoomant sur les galaxies de l’univers, on voit partout des événements de logique causale qui modifient le futur. Ils sont lents, mais leurs conséquences sont incalculables.
Je ne développerai pas ici, parce que c’est l’autre côté de l’infini, qui m’intéresse, l’Humain.
En le regardant évoluer, je me suis aperçu qu’il prolongeait la logique Darwinienne, non seulement dans son corps mais dans sa pensée, dans son inventivité.
Il ne crée pas des espèces, il crée des spécialités ! C’est la même logique qui préside à son futur. Ses connaissances évoluent, se cumulent, s’additionnent et la science se spécifie, il n’y a plus de chirurgien, il y a des spécialistes de l’oreille, d’autres des dents d’autre de l’estomac, du foie, du cerveau…. Il n’y a plus de naturaliste, il y a des spécialiste des plantes tropicales, des batraciens, des dauphins….
Les philosophes ne peuvent plus être scientifiques complet (l’inverse n’est pas vrai) parce que les sciences ne sont plus de taille individuelle, comme au temps de Pascal. Et le goût de l’humain pour la différenciation décuple ses possibilités d’investigation. Le savoir se spécifie de manière Darwinienne et comme le vivant, il se trouvent des symbioses créatrices de nouveau pouvoir et de nouveau vouloir.
Ses inventions respectent la logique évolutive : il faut que le tissu résistant des voiles pré-existe et que les cordes fines et résistantes perfectionnées pour la marine soit disponible pour que Montgolfier teste la poussée d’Archimède et fasse le premier vol humain. D'autres comprennent ce qu'ils a fait, ont d'autres idées, ils créent des symbioses de savoir.
Le moteur a vapeur dégage l’homme de la contrainte de l’étiage des fleuves, il remplace les moulins. Il se miniaturise, il remplace le cheval. Il trouve des niches et se développe en remplaçant ce qui était évolutivement moins aboutit.
Au XXème le savoir se spécifie, mais il créé une niche pour les ordinateurs et internet qui indexent tous les savoirs et permet de les retrouver facilement.
L’évolution continue, devenue finaliste par l’intelligence humaine qui progresse sans cesse et regarde l’univers qui l’a créée par l’erreur utile et l’incroyable brassage de l’inerte dans une planète tellurique.
Et l’homme n’est pas guidé par le hasard ou par l’intelligence mais bien par les deux à la fois.
Plus il devient intelligent, plus il devient maitre du futur, sauf...
Sauf, si un imprevu efface à nouveau tout ou partie du palimpseste merveilleux, qu'est notre terre. Mais ce n'est pas si grave, le vivant revient (presque) toujours.
Pierre Kéliam.
SECTION Religion, Philosophie, Science